mardi 7 mai 2013

C'est pas mon truc.


T'as vu, je t'ai fait une petite série de bébés criards, ces derniers temps. J'ai de très belles photos de bébés criards – la magie du Reflex.

Pourtant, tu sais, j'ai des enfants faciles. Enfin, plus faciles que d'autres, je crois. Ma grande est relativement sage, ne casse rien, ne jette rien. Elle fait des petits caprices, bien sûr, mais qu'on endigue assez rapidement. Elle nous écoute plutôt pas mal – mais nous lui expliquons beaucoup, aussi. Elle est souriante, bavarde, communique beaucoup, nous épate chaque jour. Elle a dormi tôt, marché tôt, parlé tôt. Mange seule et de tout. Elle va au pot depuis ses 17 mois et a porté sa première petite culotte ce matin. Elle fait des nuits fantastiques, s'endort comme une grande, grasse-matine le week-end, sieste l'après-midi. Aime sa petite soeur fraîchement née, s'en soucie, s'en inquiète et ne la jalouse que très peu (à condition qu'on s'occupe d'elle comme avant, ça va de soi). J'ose croire que nous sommes pour une petite part dans tout cela.

La petite est globalement facile elle aussi, je dirais. Disons qu'elle n'a pas de RGO, ne régurgite donc pas, dort dans son lit la nuit, se rendort après le bib, qu'elle prend toutes les quatres heures. Parfois, elle en saute un (à 23 jours d'existence, voui). Elle a de légères coliques, oui, mais se calme rapidement. Commence déjà à sourire, à faire ses premiers "areuh". Est née facilement, a perdu le cordon en trois jours, repris du poids en 24 heures.

Enfin, histoire de me faire jeter des pierres, nous avons bien eu six ou sept soirées rien qu'à nous depuis sa naissance. Genre les deux nénettes pieutées à 21 heures tapantes, et nous peinards devant la téloche comme au bon vieux temps, jusqu'à minuit. (On a même pu regarder toute la finale de "Top Chef" en direct, c'est te dire.)

Oui mais.

Oui mais voilà, les gosses, c'est pas mon truc. C'est que je me répète quand je craque, et en ce moment, c'est toutes les demi-heures. Oui mais la petite ne dort pas tout le temps. Et quand elle ne dort pas, sauf exceptions, elle pleure. Ça dépend des jours, des fois, de l'humeur. Y a des jours comme hier, elles font la même sieste au même moment, et moi j'enchaîne vaisselle, lessive, rangement, détente dans la même journée. La fin d'aprèm' se déroule dans le calme, je savoure ces petits instants doux et familiaux, la maison est proprette, ça roule, quoi.

Puis y a des jours comme aujourd'hui. Où la petite est incalmable. Où je dois choisir entre tenter de coucher la petite et rendre la grande jalouse, ou coucher la grande en laissant la petite brailler dans son lit et essayer de rester zen, mais genre super, super zen. Passer 70 % de ma journée à ne rien faire hormis arpenter mon salon en larmes, avec la petite qui refuse obstinément de dormir, mais qui hurle bien volontiers (même après avoir : donné le bib/changé trois fois la couche/bercé/câliné/embrassé/calmé, même dans le noir/la lumière, avec la musique/sans la musique, en berçant de droite à gauche/de bas en haut, dans l'écharpe/la poussette/le transat/le lit/les bras).

Et craquer, quoi. Péter un câble, même si c'est une expression des années 90. Avoir une seule envie très choquante, mais bien réelle : la jeter dans le mur ou, à défaut, la balancer violemment dans sa poussette. Très violemment. Elle pleure, je la supplie, mais elle pleure ; ma mâchoire se crispe, mes muscles se tendent, je voudrais tellement, tellement lui crier dessus, la taper.

Oui, je le dis. Je n'en suis pas fière. Je ne fais pas appel à l'amour que j'ai pour elle ; je ne l'ai pas encore vraiment. Je te l'avais dit : je suis une mère indigne. Les gosses en général, c'est pas mon truc ; mes gosses, c'est pas mon truc, mais je les aime, malgré moi, malgré mon impatience, ma frustration, ma fatigue, ma colère. Je les aime quand même. Mais j'ai besoin de temps pour les aimer. Besoin de faire leur connaissance, de construire une relation avec eux. Avec ma fille de 23 jours, non, je n'ai pas de relation, pas encore. Ça viendra. C'est complexe.

Alors oui, je voudrais la taper, mais là encore, à défaut, c'est à moi que je fous des claques, parce que moi je peux encaisser, pas elle.

Puis l'orage se calme, elle s'endort enfin... mon corps se relâche, mon esprit se calme. J'ai honte, je me dis que vraiment, je n'ai pas un gramme de tolérance, pas un poil de patience, pas un sou d'indulgence. Je m'en veux d'être aussi faible. Je pense aux parents d'enfants RGO ou hyperactifs, je pense à ceux dont les enfants ne supportent pas d'être posés, à ceux dont les gamins dorment moins d'une heure par 24 heures. Aux parents solos, aux parents de jumeaux, d'enfants malades. Je suis la lose de la parentalité. Je fais des enfants supra simples, mais je les supporte pas.

Me demande pas pourquoi je les fais. Surtout pas maintenant, là, tout de suite, alors que je suis immobile sur cette chaise en bois depuis deux heures, pour ne surtout pas réveiller ma fille qui dort enfin dans l'écharpe contre moi, et qui m'empêche de faire quoi que ce soit. Ne me dis rien, ne me juge pas, alors que j'ai pleuré une bonne dizaine de fois depuis le réveil (celui de 5 heures du mat'). Laisse-moi juste te dire comme c'est dur, alors que vu les circonstances, je devrais trouver ça si facile.

C'est un fait, mes enfants, petits du moins, c'est pas mon truc, non.
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14 commentaires:

  1. Allez je te sougaite que la journée de demain soit une de ces journées "cool" pour oublier aujourd'hui.
    Etant moi-même sur le point d'accoucher du 2eme alors que la première n'a que 16 mois et que j'ai très TRES mal vécu ses premiers mois, je me permets de t'envoyer soutien et compréhension.
    Moi non plus ma première n'était pas un bébé horrible, mais ça ne m'a pas empêcher de toucher le fond plus d'une fois. C'est fou comme dans ses moments là il est impossible de relativiser et de faire autre chose que de pleurer sur notre malheureux sort de maman emprisonnée et étouffant sous la charge qui est la notre.
    Je reviendrai te raconter ici mes "pétages de câble" d'ici quelques semaines;
    En attendant, tendresse et compassion

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    1. Courage, et n'hésite pas à passer par ici quand tu seras en pétage de plombs, on se soutiendra mutuellement... Tu accouches quand ? Moi aussi j'avais très mal vécu les premiers mois de ma grande, et aujourd'hui en fait je me rappelle trèèèèès bien pourquoi... la période nourrisson c'est pas mon dada !

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    2. D Day 20 mai, impact imminent... ça fait 9 mois que j'essaye à tout prix de ne pas céder à l'auto persuasion de "pour le deuxième c'est plus facile", j'essaye de m'imaginer le pire, tout en espérant secrètement être agréablement surprise (un peu). On a beau savoir que ça aura une fin, quand on a la tête dans le guidon, purée que c'est dur !!
      Courage et à bientôt

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  2. Je culpabilise souvent sur mon envie de tout plaquer quand moi aussi je pète un cable ! Je pense, j'en suis quasiment sure, que ça arrive à tout le monde ! Heureusement les bonnes journées sont là pour faire oublier les difficiles et nous redonner un peu d'énergie !
    Plein de bisous !

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    1. Comme tu dis, heureusement que ce n'est pas tout le temps comme ça... en fait, on gérerait super bien si on nous disait : "T'inquiète, c'est hard aujourd'hui mais dans deux heures ça ira mieux !"... ce qui rend dingue c'est de ne pas savoir quand ça s'arrêtera... hier à 23 heures on a ENFIN réussi à endormir la petite, alors que d'hab pas de souci... on devenait fous, on pensait que ça s'arrêterait jamais !

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  3. Ah oui, j'oubliais ! J'adore la photo quand même !!

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  4. Courage !! Des tonnes de courage !!! C'est la 2ème fois que tu vis ça, et comme tu dis, tu sais que ça va passer (même si là t'y crois pas hein :-) ... Tu vois s'il n'y avait pas des mamans comme toi qui mettent des mots sur ce sentiment d'avoir envie de jeter son bebe contre le mur... Je me serais sentie très anormale :-) alors merci, respire (même sur ta chaise en bois, même entre 2 sanglots), et encore plein de courage, ça finit par passer et tu le sais toi ! Elise

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    1. Merci de ton soutien <3 Oui ça va passer, j'espère (mais quand ?? on se demande toujours quand le rythme sera pris, quand on retrouvera des journées et nuits plus normales), mais c'est chaud tant qu'on est en plein dedans... ! Courage à nous !

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  5. ton post me fait penser à quelqu'un ... suivez mon regard ... ah ouais c'est moi !
    J'ai aussi des filles super faciles et pourtant je crie ... trop souvent ... j'en ai même chié sévèrement à l'arrivée de n°2 ... j'ai trop passé mes nerfs sur la pauvre Cerise qui du haut de ses 3 ans devait air comme une vraie grde ... pourtant 3 ans c'est petit et oui ! bref c'est super dur et même si je suis raide dingue de mes filles,, même si je suis super heureuse qu'elles soient deux pour elles j'avoue que pour moi un seul enfant m'aurait suffi ... mais maintenant je ne pourrais imaginer ma vie sans mes 2 amours ! ma foi je me dis toujours comment faisais-je sans elles ??? aller courage !

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    1. Pareil, des fois on se dit : "Oh si on n'en avait fait qu'une, on aurait pleiiiiin de temps libre... ou même si on n'en avait fait aucun !!"... mais on tournerait en rond dans notre chez-nous... nous on la voulait, cette famille, et on voulait, deux enfants, qui grandiraient ensemble... Ce sera top plus tard, quand elles auront une relation, pour l'instant ce sont les premières semaines qui sont dures... incroyable ce qu'on peut devenir dingues avec les mômes, dans tous les sens du terme !

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  6. Je suis comme toi, très souvent à me dire que je ne suis pas faite pour avoir des enfants. Mais les moments de tendresse et de complicité entre frère et soeur sont tellement beaux que ça efface tout et que je pense même au troisième!! Ce n'est pas tant le fait d'avoir des enfants qui me pèse, c'est de rester à la maison avec eux (je suis au chômage et je trouve rien, crise de m****!), je finis par saturer.
    Allez, on respire un grand coup et on fait des câlins! :)

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    1. Je compatis quant au fait de devoir rester chez toi, je comprends celles qui s'épanouissent à la maison en s'occupant de leurs enfants, mais ce n'est vraiment pas mon truc, j'ai la chance de pouvoir reprendre le boulot dans un mois.
      Mais te lire parler des moments de complicité entre eux me motive énormément ; déjà ma grande demande tout le temps après sa petite soeur et est aux anges dès qu'elle la voit ou peut la porter :)

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  7. Je me souviens que pour Pichoune, le premier mois avait été un calvaire parce qu'on nous avait dit : "profitez-en, après vous dormirez moins". On avait oublié de nous dire qu'on ne dormirait plus du tout alors l'envie de la jeter contre le mur on l'a eu ! Que tes filles soient faciles ne changent rien. L'arrivée d'un enfant est un bouleversement. D'ailleurs, quand on a fini par en parler parce que cela allait beaucoup mieux c'est fou le nombre d'histoires qu'on a entendues sur les parents qui craquaient ... Du coup, pour Choupinou, on s'était blindé, préparé au pire. Au final, on n'était pas préparé à ce qui s'est passé mais le retour à la maison a été un vrai bonheur ! Très facile. Évidemment, parfois, cela se passe parfaitement bien (et heureusement!) mais le dire permet aussi à ce qui écoutent ou lisent de culpabiliser un tout petit peu moins ...

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    1. Clairement, pour ma première j'aurais aimé lire combien ça pouvait être difficile pour d'autres, j'aurais moins culpabilisé. Et oui c'est dur, le simple fait d'avoir des nuits hachées, c'est difficile, quand la journée s'achève, tu n'as même pas le soulagement de te reposer la nuit...
      C'est dur, les enfants, mais quelle richesse !

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